La mise en sommeil d’une SASU représente une solution juridique stratégique permettant aux entrepreneurs de suspendre temporairement leur activité sans procéder à la dissolution de leur société. Cette procédure, encadrée par le Code de commerce, offre une alternative précieuse aux dirigeants confrontés à des difficultés passagères, des projets de reconversion ou des circonstances personnelles nécessitant un arrêt temporaire d’activité. Contrairement à une fermeture définitive, la mise en sommeil préserve l’existence juridique de la SASU tout en allégeant certaines obligations administratives et fiscales.
Cette démarche présente des avantages considérables pour les entrepreneurs souhaitant préserver leur structure juridique tout en cessant momentanément leur exploitation commerciale. Elle permet notamment de conserver l’immatriculation au registre du commerce, de maintenir les droits acquis et de faciliter une reprise d’activité ultérieure sans avoir à recréer une nouvelle société.
Définition juridique et cadre réglementaire de la mise en sommeil SASU
Le régime de mise en sommeil des sociétés trouve son fondement dans plusieurs textes législatifs et réglementaires qui en définissent précisément les contours et les modalités d’application. Cette procédure constitue un mécanisme juridique spécifique permettant aux sociétés commerciales de suspendre leur activité économique sans perdre leur personnalité morale.
Articles L223-8 et R223-8 du code de commerce : dispositions légales applicables
Le Code de commerce encadre strictement la procédure de mise en sommeil à travers plusieurs dispositions réglementaires. L’article R123-120 du Code de commerce précise que toute société peut demander son inscription modificative au registre pour cessation temporaire d’activité. Cette inscription doit intervenir dans un délai d’un mois suivant la décision de mise en sommeil prise par les organes compétents de la société.
Les textes réglementaires définissent également les obligations déclaratives et les formalités administratives qui incombent aux dirigeants souhaitant bénéficier de ce régime particulier. La réglementation impose notamment la production de documents justificatifs attestant de la régularité de la situation juridique et fiscale de la société au moment de la demande.
Distinction entre mise en sommeil et cessation temporaire d’activité
Il convient de distinguer la mise en sommeil proprement dite de la simple cessation temporaire d’activité. La mise en sommeil constitue un statut juridique officiel, reconnu par l’administration et faisant l’objet d’une inscription modificative au registre du commerce et des sociétés. Elle entraîne des conséquences juridiques, fiscales et sociales spécifiques.
À l’inverse, une cessation temporaire d’activité non déclarée expose la société à des risques importants, notamment en matière de radiation d’office pour défaut d’activité. La mise en sommeil officielle protège la société contre ces risques tout en lui conférant un statut légal adapté à sa situation d’inactivité temporaire.
Durée maximale de sommeil : limitation à deux années consécutives
La législation française impose une limitation temporelle stricte à la période de mise en sommeil. Cette durée ne peut excéder deux années consécutives à compter de la date d’inscription modificative au registre. Cette limitation vise à éviter que des sociétés utilisent ce mécanisme pour maintenir artificiellement leur existence sans activité économique réelle.
Au terme de cette période maximale, la société doit impérativement choisir entre trois options : reprendre son activité par une déclaration de reprise, procéder à sa dissolution volontaire, ou s’exposer à une radiation d’office par le greffier du tribunal de commerce. Cette contrainte temporelle incite les dirigeants à prendre des décisions claires concernant l’avenir de leur société.
La durée maximale de deux ans constitue un délai de réflexion suffisant pour permettre aux entrepreneurs de clarifier leurs perspectives tout en évitant la création de structures dormantes.
Obligations déclaratives auprès du registre du commerce et des sociétés
La mise en sommeil nécessite l’accomplissement de formalités déclaratives précises auprès du registre du commerce et des sociétés. Ces démarches doivent être effectuées dans un délai d’un mois suivant la décision de cessation temporaire d’activité prise par l’associé unique ou le président selon les dispositions statutaires.
L’inscription modificative au registre entraîne automatiquement la publication d’un avis au Bulletin Officiel des Annonces Civiles et Commerciales (BODACC), assurant ainsi la publicité de la situation auprès des tiers. Cette publicité légale protège les cocontractants et les créanciers en les informant de l’état d’inactivité temporaire de la société.
Conditions préalables obligatoires pour l’activation du régime de sommeil
L’accès au régime de mise en sommeil n’est pas automatique et nécessite le respect de conditions préalables strictes destinées à garantir la régularité de la procédure et la protection des intérêts des tiers. Ces conditions visent à s’assurer que la société présente une situation juridique et financière saine avant de bénéficier de ce régime particulier.
Résolution de l’associé unique : formalisme et contenu requis
La décision de mise en sommeil doit faire l’objet d’une résolution formelle de l’associé unique de la SASU, ou du président selon les dispositions statutaires. Cette résolution doit être consignée dans un procès-verbal daté et signé, précisant les motifs de la cessation temporaire d’activité et la durée envisagée du sommeil.
Le procès-verbal doit mentionner explicitement la volonté de suspendre l’activité économique tout en maintenant l’existence juridique de la société. Il convient également d’indiquer les mesures prises pour assurer la conservation du patrimoine social et la gestion des affaires courantes pendant la période d’inactivité.
Apurement des dettes sociales et régularisation fiscale préalable
La société candidate à la mise en sommeil doit présenter une situation financière régularisée, notamment en ce qui concerne ses obligations fiscales et sociales. L’apurement des dettes sociales constitue une condition sine qua non pour bénéficier du régime de sommeil. Cette exigence vise à éviter que des sociétés utilisent cette procédure pour échapper à leurs obligations légales.
Les administrations fiscales et sociales vérifient systématiquement la régularité des déclarations et le paiement des cotisations et impôts dus avant d’autoriser la mise en sommeil. Toute situation contentieuse ou tout retard de paiement peut constituer un obstacle à l’obtention de ce statut particulier.
Dépôt des comptes annuels en cours et respect des obligations comptables
La SASU doit être à jour de ses obligations comptables et avoir procédé au dépôt de ses derniers comptes annuels auprès du registre du commerce et des sociétés. Cette condition garantit la transparence financière de la société et permet aux tiers d’évaluer sa situation patrimoniale avant la période de sommeil.
Le respect des obligations comptables inclut également la tenue régulière de la comptabilité, l’établissement des comptes annuels et leur approbation par l’associé unique dans les délais légaux. Ces éléments attestent du sérieux de la gestion sociale et de la régularité du fonctionnement de la société.
Absence de procédure collective ou de redressement judiciaire en cours
Une société faisant l’objet d’une procédure collective ou d’un redressement judiciaire ne peut bénéficier du régime de mise en sommeil. Cette exclusion s’explique par l’incompatibilité entre l’état de cessation des paiements et la suspension volontaire d’activité. Les difficultés financières graves nécessitent des mesures de traitement spécifiques prévues par le droit des entreprises en difficulté.
L’absence de procédure collective constitue donc un prérequis absolu pour accéder au régime de sommeil. Cette condition protège les créanciers et évite que des sociétés en situation précaire utilisent cette procédure pour retarder le traitement de leurs difficultés financières.
Procédure administrative et formalités déclaratives obligatoires
La mise en œuvre effective de la mise en sommeil nécessite l’accomplissement d’un ensemble de formalités administratives précises et chronologiques. Ces démarches, désormais simplifiées par la dématérialisation des procédures, doivent être effectuées selon un calendrier strict pour garantir la régularité juridique de l’opération.
Dossier de demande au centre de formalités des entreprises compétent
Depuis la mise en place du guichet unique des formalités d’entreprises, la demande de mise en sommeil s’effectue exclusivement par voie dématérialisée sur la plateforme de l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI). Cette centralisation simplifie considérablement les démarches tout en garantissant la transmission des informations aux différentes administrations concernées.
Le dossier de demande doit être constitué avec soin et comprendre l’ensemble des pièces justificatives requises. La complétude du dossier conditionne la rapidité de traitement de la demande et évite les demandes de régularisation qui peuvent retarder la procédure. L’instruction du dossier par les services compétents intervient généralement dans un délai de quelques jours ouvrés.
Formulaire M2 de modification et pièces justificatives requises
Le formulaire M2 constitue le document central de la procédure de mise en sommeil. Ce formulaire de modification doit être rempli avec précision et signé par le représentant légal de la société. Il doit mentionner explicitement la nature de la modification demandée, à savoir la cessation temporaire d’activité.
Les pièces justificatives accompagnant le formulaire M2 comprennent notamment le procès-verbal de la décision de mise en sommeil, un exemplaire des statuts à jour, et le cas échéant, les documents attestant de la régularisation de la situation fiscale et sociale. La production de ces documents conditionne l’acceptation de la demande par les services instructeurs.
Publication au bulletin officiel des annonces civiles et commerciales
La publicité légale de la mise en sommeil s’effectue automatiquement par insertion au BODACC suite à l’inscription modificative au registre. Cette publication, prise en charge par les services du greffe, assure l’information des tiers sur le changement de situation de la société. L’avis publié précise la date d’effet de la cessation temporaire d’activité et la durée maximale du sommeil.
Contrairement à certaines autres formalités, la mise en sommeil ne nécessite pas de publication préalable dans un journal d’annonces légales. Cette simplification réduit les coûts de la procédure tout en maintenant un niveau d’information suffisant des tiers intéressés.
Notification aux administrations fiscales et sociales concernées
Le guichet unique assure automatiquement la transmission des informations relatives à la mise en sommeil aux différentes administrations fiscales et sociales. Cette notification déclenche l’adaptation des obligations déclaratives et le cas échéant, la suspension de certaines procédures de recouvrement pour les périodes postérieures à la mise en sommeil.
Les administrations concernées incluent notamment la Direction Générale des Finances Publiques, l’URSSAF, et les services de la sécurité sociale des indépendants selon le statut du dirigeant. Cette coordination administrative évite les démarches multiples et garantit la cohérence du traitement de la situation de la société.
Impact fiscal et social pendant la période de sommeil SASU
La période de mise en sommeil entraîne des modifications significatives du régime fiscal et social applicable à la SASU, avec des allègements substantiels de certaines obligations tout en maintenant d’autres responsabilités fondamentales. Cette adaptation du régime fiscal et social constitue l’un des principaux avantages de la procédure de mise en sommeil pour les entreprises temporairement inactives.
En matière de taxe sur la valeur ajoutée , la société en sommeil bénéficie d’une suspension de ses obligations déclaratives dès lors qu’elle ne réalise aucune opération imposable. Cette dispense concerne les déclarations périodiques de TVA (CA3 ou CA12) mais n’exonère pas la société de déclarer d’éventuelles opérations résiduelles liées à la gestion de son patrimoine ou à des activités accessoires.
Le régime de l’impôt sur les sociétés subit également des adaptations importantes pendant la période de sommeil. Bien que la société demeure redevable de l’impôt sur les sociétés, elle peut bénéficier d’une réduction significative de sa base imposable en l’absence d’activité économique. Les charges de structure minimales et les produits financiers éventuels restent néanmoins soumis à l’imposition selon les règles de droit commun.
La cotisation foncière des entreprises fait l’objet d’un traitement particulier pour les sociétés en sommeil. L’exonération de CFE intervient automatiquement après douze mois complets d’inactivité, sous réserve que la société n’exerce effectivement aucune activité économique. Cette exonération représente un avantage financier non négligeable pour les entreprises dont l’activité est durablement suspendue.
Sur le plan social, le statut du président de SASU connaît des évolutions importantes pendant la période de sommeil. En tant qu’assimilé salarié, le dirigeant reste affilié au régime général de la sécurité sociale, mais l’absence de rémunération entraîne la suspension du versement des cotisations sociales. Cette situation peut avoir des conséquences sur les droits à prestations, notamment en matière d’assurance maladie et de retraite.
Les obligations comptables demeurent en vigueur pendant toute la durée du sommeil, avec toutefois des simplifications importantes pour les sociétés qui respectent certains critères de taille. Les micro-entreprises peuvent notamment opter pour l’établissement de comptes annuels sous forme abrégée, réduisant sensiblement la charge administrative liée à la tenue de la comptabilité.
Les allègements fiscaux et sociaux pendant la période de sommeil permettent aux entrepreneurs de préserver leurs ressources tout en maintenant l’existence juridique de leur société.
Conséquences juridiques et patrimoniales de la mise en sommeil
La mise en sommeil d’une SASU génère des conséquences juridiques multiples qui affectent tant la structure de la société que ses relations contractuelles avec les tiers. Ces implications nécessitent une analyse approfondie pour éviter les écueils juridiques et préserver les intérêts patrimoniaux de l’entreprise pendant sa période d’inactivité.
L’existence juridique de la SASU demeure pleinement maintenue pendant la période de sommeil, contrairement à une dissolution qui entraînerait la disparition progressive de la personnalité morale. Cette continuité juridique permet à la société de conserver ses droits et obligations, ses contrats en cours et son patrimoine social sans altération de sa capacité juridique fondamentale.
Les contrats commerciaux en cours subissent des effets variables selon leurs stipulations spécifiques et la nature des prestations concernées. Les contrats de fourniture ou de prestations de services peuvent être suspendus de plein droit si leur exécution devient impossible du fait de l’inactivité de la société. Cette suspension contractuelle protège la société contre d’éventuelles demandes de dommages-intérêts pour inexécution.
La question du bail commercial revêt une importance particulière pour les SASU disposant de locaux d’exploitation. Certains baux contiennent des clauses d’exploitation continue qui peuvent être invoquées par le bailleur pour résilier le contrat en cas de cessation d’activité prolongée. Il convient donc d’examiner attentivement les stipulations du bail et d’envisager une renégociation préalable à la mise en sommeil.
La préservation du bail commercial pendant le sommeil nécessite souvent une négociation préalable avec le bailleur pour adapter les conditions contractuelles à la situation d’inactivité temporaire.
Les créances et dettes de la société conservent leur exigibilité pendant la période de sommeil, mais leur recouvrement peut être rendu plus complexe par l’absence d’activité économique. Les créanciers maintiennent leurs droits d’action en justice et peuvent engager des procédures de recouvrement selon les modalités de droit commun, nonobstant l’état de sommeil de leur débiteur.
Le patrimoine social de la SASU bénéficie d’une protection renforcée pendant la période d’inactivité, notamment à travers l’impossibilité pour l’associé unique de procéder à des distributions de dividendes ou à des réductions de capital sans justification économique légitime. Cette protection vise à préserver l’intégrité du gage des créanciers pendant une période de vulnérabilité accrue.
Procédure de réveil et réactivation de l’activité sociale
La sortie du régime de mise en sommeil constitue une étape cruciale qui détermine l’avenir de la SASU et nécessite l’accomplissement de formalités administratives précises dans le respect des délais légaux. Cette procédure de réactivation peut intervenir à tout moment pendant la période de sommeil, à l’initiative de l’associé unique ou par nécessité légale à l’approche de l’échéance maximale de deux ans.
La décision de reprise d’activité doit faire l’objet d’une résolution formelle de l’associé unique, consignée dans un procès-verbal daté et signé. Cette décision peut être motivée par l’amélioration des conditions économiques, l’aboutissement d’un projet de développement, ou simplement par la volonté de l’entrepreneur de relancer son activité commerciale. Le procès-verbal doit préciser la date effective de reprise et les modalités envisagées pour le redémarrage de l’activité.
Les formalités administratives de réveil s’effectuent selon une procédure similaire à celle de la mise en sommeil, mais en sens inverse. Le dossier de demande doit être déposé sur le guichet unique des formalités d’entreprises dans un délai d’un mois suivant la décision de reprise d’activité. Cette déclaration modificative entraîne automatiquement la mise à jour du registre du commerce et des sociétés et la publication d’un avis au BODACC informant les tiers de la reprise d’activité.
La réactivation peut s’accompagner de modifications statutaires importantes, notamment en cas de changement d’objet social pour adapter l’activité de la société à de nouveaux marchés ou à de nouvelles opportunités économiques. Ces modifications nécessitent l’accomplissement de formalités complémentaires, incluant la publication d’une annonce légale et la mise à jour des statuts auprès du registre.
Les obligations fiscales et sociales reprennent automatiquement leur cours dès la date effective de reprise d’activité déclarée par la société. Cette réactivation déclenche notamment la reprise des obligations déclaratives en matière de TVA, l’assujettissement à la cotisation foncière des entreprises et le rétablissement des cotisations sociales du dirigeant en cas de perception de rémunérations.
L’adaptation de l’organisation comptable constitue un enjeu majeur de la période de réactivation. La société doit mettre en place les procédures et les outils nécessaires pour assurer la tenue régulière de sa comptabilité et le respect de ses obligations déclaratives. Cette réorganisation peut nécessiter le recours à des conseils spécialisés pour optimiser la gestion administrative et financière de l’entreprise relancée.
En cas d’absence de décision avant l’expiration du délai maximal de deux ans, la société s’expose à une radiation d’office prononcée par le greffier du tribunal de commerce. Cette procédure d’office intervient après mise en demeure adressée au représentant légal par lettre recommandée avec accusé de réception. La radiation d’office entraîne la dissolution de plein droit de la société et la perte définitive de sa personnalité morale.
La vigilance quant aux échéances légales s’avère cruciale pour éviter la radiation d’office et préserver la continuité juridique de l’entreprise pendant et après la période de sommeil.
Les entrepreneurs disposent également de la possibilité de procéder à une dissolution volontaire de leur SASU à l’issue de la période de sommeil, si les perspectives de reprise d’activité ne s’avèrent pas favorables. Cette dissolution anticipée permet de maîtriser le processus de liquidation et d’optimiser la répartition du patrimoine social selon les intérêts de l’associé unique.
La préparation de la sortie de sommeil nécessite une évaluation complète de l’environnement économique et concurrentiel, ainsi qu’une analyse des ressources financières et humaines nécessaires à la reprise effective de l’activité. Cette phase de réflexion stratégique conditionne largement le succès de la relance et justifie souvent le recours à un accompagnement professionnel spécialisé.